LE NEPTUNE FRANÇOIS, ou RECUEIL DES CARTES MARINES. LEVEES ET GRAVEES PAR ORDRE DU ROY. CONTENANT LES COSTES DE U EU ROT E SUR L'OCEAN, depuis Eronthem en Norvège jufques au Détroit de Gibraltar, avec la Mer Baltique. &c. A Pres tout ce que leRoya fait pour mettre la Marine dans Mat floriffantoùelle eft aujourd'hui il ne manquoit à la perfection de ce grand ouvrage que des Cartes fideles. Et pour y parvenir, SaMajeflé a non feulement établi une Academie compofée des plus fça- vans Mathématiciens & Aftronomes, qui ont déterminé par leurs obfervations, les latitudes & les longitudes des principaux lieux de la terre; mais elle a en même temps employé plufieurs habiles Ingénieurs & Pilotes, à lever les côtes, tant de fon Royaume, que des Pays Etrangers, & a fait ramaffer de toutes parts, les Cartes & les Mémoires qui pouvoientfervir à ce deflein. Sur ces déterminations de latitude & de longitude, & fur ces Cartes & Mémoires on a dreffé ce recueil que Sa Majefté a bien voulu qu’on donnât au public. On y a apporté tout le foin & l’exaâitude poflible, & on a tâché de ne rien omettre de ce qui en pouvoir rendre l’ufage plus facile. Comme ces Cartes font fort differentes des Cartes Marines ordinaires, on a crû devoir faire à leur occafion les remarques lùivantes. REMARQUES SUR LES CARTES DE CE RECUEIL L T ’On fo fert dans ce recueil de Cartes réduites, c’eft-à-dire de celles dont les degrez —/de longitude font marquez en parties égales, 2c ceux de latitude en parties inégales qui vont en augmentant vers les pôles ; parce que dans les Cartes Marines on eft obligé de tirer les rhumbs ou airs de vent en lignes droites faifàntdes angles égaux-, D’où l’on démon tre que neceflàirement les méridiens ou les lignes de Nord-Sud, font parallèles entre elles, 6c quelles divifont l’Equateur ôc toutes les lignes d’Eft-Ouell en parties égales, pour reprefenter les degrez 2c les minutes de longitude, 2c qu’enfin les parties qui reprefentent les degrez 2c les minutes de latitude, doivent augmenter dans la proportion des focantes. De là il s’enfuit que les Cartes Plates dont on fc fert ordinairement, font abfolument faufies, puis que marquant les rhumbs de vent en lignes droites, elles ont les degrez de latitude en parties égales. II. On s’ell attaché julqu’à prefont aux Cartes Plates, parce que les degrez de latitude y font reprefentez par des parties égales comme fur le Globe, 2c que par conlequent les échelles y font aulîi divifées en parties égales ; ce qui fait que l’ufage de ces échelles paroît d’autant plus facile, qu’une feule fuffit pour meforer toute forte de diftances -, cependant ces avantages qui leur ont donné la préférence, ne font qu’apparens, puifque par la nature de la carte plate, ces diftances font fenfiblement faillies, aulîi bien que les airs de vent; 2c de plus, on ne peut con clure la longitude 2c le lieu de l’arrivée, c’eft-à-dire on ne fçauroit pointer cette forte de carte, qu’aprés plufieurs operations longues 2c embaralfantes. III. Il lèmble que la difficulté de trouver l’échelle fur les cartes réduites, en ait fait négli ger l’ulàge j mais cette difficulté celfera pour peu qu’on foit accoutumé à la trouver de la ma niéré dont nous le dirons dan s les problèmes fuivans ; outre qu’on aura les diftances plus juftes, 2c qu’on pointera par leur moyen les cartes avec beaucoup plus de facilité ; puifque fans fè fer- vir du Quartier de redudion ou de tables, on trouvera la longitude 2c le lieu de l’arrivée. IV. La defoription des côtes dans les cartes de ce recueil, c’eft-à-dire leur configuration eft fans comparaifon plus exade que dans toutes les autres cartes qui ont paru jufqu a prefent ; parce que la bafe de la plulpart des cartes ordinaires, a été prifè for les anciennes cartes du fieele paffié, au lieu que la plus grande partie de celles de ce recueil, a été levée par ordre du Roy avec un foin tres-particulier, 2c que le refte a été pris fur les meilleures cartes de ce temps. V. Les Pilotes n’ont fait les corredions des cartes ordinaires qu’à veiie étant fur la mer, for quoy il faut remarquer que i. Us n’ont placé les Caps, les Roches, les Bancs, 2cc. qu’avec la Bouftole, qui eft fojette à plufieurs deffauts, tant du côté de la variation de l’aiguille, 2c du frottement de la chape for fon pivot, que du côté de la petiteflè des degrez du carton, z. Us n’ont marqué les diftances que par eftime, laquelle eft fort fojette à erreur. }. Us font les Bayes 2c Havres qu’ils fréquentent, beaucoup plus grands que la proportion du refte des côtes ne le permet, 2c ainfi l’échelle de leurs cartes ne peut fêrvir à les meforer. 4. Les endroits qu’ils ne fréquentent point, font entièrement négligez, 2c n’ont fouvent aucune figure qui approche de la véritable. Dans les Cartes de ce recueil au contraire, le plus grand nombre a été levé par des Ingénieurs & des Pilotes habiles, avec des injlrumens tres-exaéls, & par des obfervations faites fur terre, & de Cap en Cap, & ainfi rien riy efi négligé y 2c la plulpart de ces cartes font fur un fi grand point, que les Bayes 2c Havres les plus fréquentez, y font aflèz grands, quoy qu’ils conlervent leur proportion avec le refte des côtes. VI. Les latitudes des cartes ordinaires n’ont été réglées que par des Pilotes, avec des in- ftrumens fort groffiers, delquels ils font obligez de fè fervir fur mer ; 2c les longitudes 11e font prifès que par eftime, qui eft une maniéré qu’on reconnoît fi fiutive, que l’on négligé de les marquer fur les cartes marines ; au lieu que les latitudes 2c longitudes des cartes de ce recueil, ont été réglées par des obfervations faites fur terre avec des Inftrumens tres-exa&s; 2c ces longitudes font d’autant plus precifes, quelles ont été déterminées parles éclipfos des Satellites de Jupiter, qui eft le moyen le plus sûr, 2c dont le public a obligation à M. Caffini, lequel a eu la plus grande part dans ces obfervations. il nous a communiqué celles de plufieurs autres fçavans Aftronomes. VII. Les obfervations ont bien donné les véritables latitudes, mais elles n’ont donné que les différences en longitude au méridien de Paris : c’cft pourquoy il a falu une fois détermi ner fà longitude, pour conclure enfuite celle des autres lieux ; 2c pour cela M. Chazclles qui a dreffé les cartes des côtes de France que nous donnons dans ce recueil, a confideré que fui- vant des obforvations tres-exa&es, l’Ifle de Gorée prés le Cap Verd, n’eft éloignée de Paris que de 1 p d zj', 2c les meilleures cartes marines ne mettent qu’environ un degré entre l’Ifle de Gorée, 2c l’Ifle de Fer, par laquelle on fuppofo que paffe le premier méridien; 2c for ce fondement, il a jugé, qu’on ne pouvoit donner à la longitude de Paris plus de z 1. degrez. L’on retiendra cette détermination de longitude, jufqu’à ce que l’on ait par des obforvations immédiates, la vraye différence des méridiens de Paris, 2c de l’Ifle de Fer : Cette longitude eft moindre que celle de Ptolomée 2c de ceux qui l’ont fuivi, de z d 3 0. VIII. L’on a marqué les degrez de latitude 2c de longitude fur toutes les Cartes de ce re cueil, excepté fur les huit particulières de Bretagne, & celles du Détroit du S en l, que l'on donne, telles que M. delà Voyeles a levéesj auffi bien que les côtes foptentrionales d’Efpagne, qui ont été levées par M rs Minet & de Gennes. IX. Les Hollandois ont affefté de marquer for les cartes particulières les veües des côtes telles quelles paroiffent de la mer, lors qu’on eft vis-à-vis ; mais de l’aveu de tous les Pilotes, ces veües font tres-imparfaites, 2c d’autant plus inutiles, que les objets qui font éloignez dans les terres, ayant été rapportez for la côte, ne fe reconnoiflent plus, lors qu’on eft dans une autre fituation que celle dans laquelle ils ont été levez. C’eft ce qui a déterminé à ne pas mettre ces veües for les cartes de ce recueil, mais feulement à placer les objets dans leur fi tuation naturelle, afin que les regardant de differens points, on les vift par le travers les uns des autres, dans leurs véritables airs de vent. X. Les cartes de ce recueil ayant été levées 2cdreflees avec tant d’exaéfitude, on ne doit pas s’étonner fi elles font fort differentes de toutes les autres cartes, 2c il y a lieu de croire que dans la fuite elles produiront deux effets. L’un quelles ôteront les équivoques que les cartes ordinaires donnent en faifânt attribuer aux courants, ce que l’on doit attribuer aux faufles diftances qu’el- les marquent : l’autre quelles ferviront à corriger les cartes que l’on fera dorénavant. XI. Pourfaciliterl’ufàgede ces cartes, l’on y a joint I. La maniéré de s’en forvir en expliquant les Problèmes les plus ordinaires du Pilotage. II. Les heures des marées dans les principaux Ports de l’Europe. III. Les Echelles que M. Sauveur, qui a drefie une partie de ces Cartes, a faites pour abréger les calculs de Marine. De la maniéré de fe fervir des Cartes de ce recueil P R O B L E' M E I. Trouver la Latitude d’un lieu. I. Ti KFttez une pointe du compas fur cçdieu, ôc l’autre for le point qui eft vis-à-vis XV JL dans la ligne d’Eft-Oueft la plus proche, z. Portez cette ouverture de compas for le méridien, ou la ligne de Nord-Sud qui eft graduée, en mettant une pointe fur l’endroit où cette Ligne d’Eft-Oueft la coupe, l’autre pointe tombant du même côté qu’eft le lieu pro- pofé, marquera là latitude. Exemple, pour trouver la latitude de Cherbourg, Prennez avec un compas là diftance au point qui eft vis-à-vis dans la ligne d’Eft-Oueft la plus proche. Portez cette ouverture de compas fur la ligne de Nord-Sud qui eft graduée, en mettant une pointe for l’endroit où cette ligne d’Eft-Oueft la coupe, l’autre pointe marquera 4p. degrez, & environ 5 8. minu tes pour la latitude de Cherbourg. P R O B L e' M E IL Trouver la longitude d'un lieu. 1. Mettez une pointe du compas for ce lieu, & l’autre fur le point qui eft vis-a-vis dans la ligne de Nord-Sud la plus proche, z. Portez cette ouverture de compas for le parallèle à l’Equateur ou fur la ligne d’Eft-Oueft, qui eft graduée, en mettant une pointe fur l’endroit A